• Chapitre 3 : Antoine

    Une trentaine d’années s’est écoulée.

    « Mais qu’est-ce que je fiche là ? »

         Cette phrase est un leitmotiv dans la vie d’Antoine Deschamps.
         En contrebas, des voitures de police stationnent, tous gyrophares sortis. Ca clignote tellement qu'on pourrait croire à des illuminations de noël, le côté festif en moins. Au départ, ça devait être un coup facile. Un camion d’électroménager qui devait partir le lendemain matin et qui n'attendait qu'un chauffeur bénévole durant la nuit. Pas de chance, les bons coups c'est comme les offres d'emplois, y'a toujours quelqu'un qui passe juste avant vous et qui empoche le lot. Maintenant Antoine attend, bloqué sur le toit, que les choses se calment.
         Il est vrai que si les flics le chopent ils auront du mal à l’accuser du vol : on ne fait pas disparaître un quarante cinq tonnes dans les poches d'un sweat-shirt. Techniquement parlant il n'a rien à se reprocher, cette fois-ci au moins. Mais il n'est jamais bon de se faire attraper sur les lieux d'un vol. Se faire cuisiner en tant que témoin c'est à peine moins pire qu'en tant que suspect, surtout quand on sait qu'on a des choses à se reprocher. Mieux vaut faire profil bas et attendre.
         Non loin de là, d'autres tentent de se faire oublier. De sa position, Antoine a pu observer un curieux manège à quelques distances. Quand les flics seront partis il ira faire un tour par là pour jeter un œil. Il y a peut être un truc à découvrir. Parfois les informations peuvent valoir leur prix quand on sait à qui les vendre.
         En attendant, il fait froid. Le vent souffle de l’océan et apporte une humidité qui transperce les vêtements et la peau. Antoine ne sait pas trop si la goutte qui commence à se former à la pointe de son nez provient de la condensation ou, plus probablement, d’une sinusite débutante.

    "Quand est-ce qu'ils s'en vont ? Il fait froid bordel ! Je vais choper un rhume avec leurs conneries ! Allez, foutez le camp ! La machine à café vous attend !", ne peut il s'empêcher de pester à voix basse.

         Ca y est, ils s’en vont. Les meilleurs choses ont une fin. Les policiers réintègrent leurs véhicules et retournent se réfugier dans le commissariat, au chaud les veinards. C’est le moment d’aller voir ce qui se passe dans l’autre entrepôt.
          Avec un peu d’habitude on apprend à marcher sans bruit dans ce métier. Se déplacer sur des toits en tôle provoque des grincements mais, si on sait y faire, les sons que l’on produit se distinguent à peine de ceux que provoque le vent.
         En quelques reptations et manœuvres acrobatiques il se retrouve sur le toit de la bâtisse qu'il a repérée un peu plus tôt. Quand les sirènes se sont faites entendre, plusieurs véhicules se sont prestement engouffrés dedans. Il est temps de découvrir le pourquoi de ce discret attroupement.
          Les entrepôts sont rarement sécurisés par le toit. L’essentiel du temps un cadenas sur la porte est la seule protection contre les voleurs. Faire plus en matière de sécurité ne serait pas rentable quand on peut ouvrir les murs avec une simple cisaille à tôle.
         Près de la faîtière une petite éminence est érigée. De gros ventilateurs brassent l'air avec frénésie. Une trappe de maintenance permet de d'entrer. Elle n'est même pas fermée.

         A l’intérieur, des luminaires sont suspendus par de longs filins. Ils apportent près du sol une lumière plus vive et noient les hauteurs dans une obscurité salutaire. Parfait! C'est idéal pour un observateur indépendant.
         Difficile de reconnaître les personnes en contrebas. Vus en plongée, Antoine a du mal à discerner leurs traits.  En revanche, on voit bien les crânes. Ca n’a que très peu d’intérêt mais il les voit bien. Il remarque aussi que, de chaque côté de plusieurs des crânes, des épaules dépassent assez largement. De ci de là, des armes sont portées à bout de bras ou en bandoulière. Ceux qui ne les portent pas en évidence doivent les avoir cachées dans un holster. Mieux vaut éviter d’éternuer. On oublie souvent de citer la mort par arme à feu  parmi les complications possibles d’un rhume.
         Le local est un marché aux poissons. A cette heure-là il devrait être désert. La ventilation fonctionne en permanence pour évacuer les relents de la pêche de la veille. Les énormes ventilateurs masquent le peu de bruits qu’Antoine produit. L'inconvénient, c'est que ce dernier ne discerne rien de ce qui peut bien se dire, et ça c’est plus regrettable.

         Avant de s’éloigner de son poste d'observation en relative sécurité, il est préférable de prendre un peu de temps pour bien évaluer la situation. Courir des risques pour rien n’est pas un bon calcul.
         Visiblement une négociation est en cours. Quatre camions et plusieurs autres véhicules sont présents. A vue de nez il semble y avoir quatre groupes qui ne se mélangent pas et s’observent avec méfiance. La tension semble monter d’un cran encore quand les lourdes portes de métal du hangar s’ouvrent pour laisser entrer un nouveau camion suivi de trois voitures. Ce ne sont pas des renforts, mais un cinquième groupe. Visiblement ils étaient attendus. Dès que les véhicules s’arrêtent, de nouveaux hommes armés en surgissent et prennent position, puis un petit homme rondouillard en costume chic émerge à son tour.  Après quelques salutations circonspectes, il entame des pourparlers avec les responsables des quatre autres factions. Les hommes de main de chaque clan, à distance respectable des négociateurs, se surveillent les uns les autres, sur leurs gardes.
         Les représentants sont invités à entrer dans le dernier camion. Antoine n’entend pas la conversation, mais il semble évident qu’il y a là dedans une marchandise d’une valeur suffisante pour que des "concurrents" acceptent d’enterrer la hache de guerre le temps d’une transaction. Drogue ? Arme ? A priori ça ne doit pas être des documents. Il n’aurait pas été nécessaire de les acheminer avec un aussi gros véhicule.


    "Foutus ventilos! On entend rien !",marmonne-t-il.


         En revanche, l’odeur qui s’échappe dès l’ouverture des portes renseigne immédiatement. Une odeur doucereuse de ménagerie. Antoine a une très bonne mémoire olfactive. C’est l’odeur de grands carnivores. Et les seuls grands carnivores à valoir suffisamment d’argent pour réunir ces hommes-là sont des félins. Depuis qu’ils sont protégés, la valeur au marché noir de ces bestioles est devenue prohibitive. Ils sont relâchés dans des propriétés privées pour des safaris à domicile.
         Déjà un des hommes en noir ressort du camion et hèle ses hommes. Une grosse caisse est déchargée avec précautions. Vu la taille de la caisse c’est un animal d’un bon gabarit. Un tigre peut être. La vente d’une bête comme cela peut rapporter une somme assez prodigieuse.
         Trois hommes sont réquisitionnés pour transporter la précieuse cargaison dans le camion de son nouveau propriétaire. Alors qu’ils sont en cours de chargement des voix commencent à s’élever de l’intérieur du camion de vente. Il semble qu’un litige oppose plusieurs personnes à l’intérieur.
         Un coup de feu retentit. D’où il est Antoine a juste le temps de voir, à travers la porte du camion, l’éclair lumineux d’une détonation.
         Pendant une fraction de seconde, les gestes de tous les protagonistes se figent. Puis le massacre commence. Antoine se précipite aussitôt dans la cabine d’une petite grue qu’il avait remarquée un peu plus tôt. Accrochée à un rail qui se poursuit tout le long de la structure elle doit servir en temps normal à déplacer les palettes les jours de vente. Elle n’est pas blindée mais offrira quand même une protection plus sûre que rien contre les balles perdues.
         Dans ce grand espace vide il y a peu de places où trouver un abri. La plupart des hommes qui ne se sont pas réfugiés derrière un véhicule quelconque se sont fait éliminer dans les premières secondes.
         Les échanges de coup de feu sont nourris.  L’inconvénient des armes automatiques c’est qu’on ne vise pas, on tire dans le tas en balayant et on prie pour que ça fasse mouche.
         Une des balles a dû toucher un appareil électrique car les plombs sautent et la lumière disparaît. A côté de lui, Antoine entend disparaître le bruit rassurant des pales de la grosse ventilation. Fini pour lui la couverture sonore.
         Dans le noir, difficile de viser. Le premier qui allumera une lumière ou tirera sait qu’il se fera repérer et servira de cible à tout le monde. Au loin le bruit des sirènes de police se fait entendre. Ils n’avaient pas dû partir bien loin tout compte fait.

    « Cessez le feu. Tout le monde se tire !!! »

         Difficile de dire qui a crié cette phrase mais elle semble faire consensus.
         Les voitures en état de marche sont rapidement remplies avec les hommes en état de vivre et démarrent aussitôt. Un camion ouvre la route en percutant les portes en tôle qu’il emporte avec lui. Deux par deux les autre véhicules suivent et se dispersent dehors. Les véhicules de police, arrivant simultanément, embrayent immédiatement sur la poursuite.
         Dans l’angle du bâtiment un des camions diffuse de ses phares une lumière qui troue l’obscurité. Sur le sol des cadavres gisent. Certains ont été écrasés lors de la fuite précipitée. Peut-être auraient-ils eu une chance en d’autres circonstances.
         Derrière le volant le conducteur s’est affaissé. Progressivement il glisse dans la direction de la portière mal fermée qui cède et n’entrave pas sa chute. La tête la première son corps percute la dalle de béton.
    Pas un bruit. Pas un geignement. Le ventilateur n’est plus là pour couvrir les bruits d’Antoine. Si il bouge on l’entendra forcément.

    « Y’a quelqu’un ? Je me rends, ne tirez pas. Je suis vers le plafond. Je vais descendre. Je ne suis pas armé je n’étais que de passage. Je peux vous aider à vous tirer d’ici alors ne me tirez pas dessus. Houhou, y’a quelqu’un ? Regardez, je suis au sol, j’ai les mains en l’air. Les flics ne vont pas tarder à revenir alors il vaut mieux partir vite fait . Personne ? »

         Il ne reste visiblement que lui et le camion qui ronronne doucement.

         Le camion !!!

         C’est celui qui a été chargé avec la caisse. Pourvu que la bête n’ait pas reçu une balle perdue.
         Pas le temps de vérifier. Après tout il avait prévu de revenir avec un camion ce soir. La cargaison change mais un camion ça reste un camion quand on y pense. Il n’aura pas tous les jours une aubaine pareille. Pas de témoin, des gens qui ne demanderont qu’à s’accuser mutuellement…
         Il n’a pas finit de réfléchir qu’il est déjà en train de manœuvrer le véhicule dans l’ouverture béante.
         C’est un véhicule sombre. Pas tout à fait noir mais d’une teinte indéfinissable entre le marron foncé et le gris sombre. Pas neuf, cela va de soi. Les marques de balle se voient un peu mais qui regarde les camions passer à trois heures du matin ?...Personne visiblement.
         Les rues sont désertes. Les forces de police et les fuyards ont eu le champ libre pour leur course poursuite. Ils sont déjà depuis longtemps hors de portée. D’un autre côté c’est rassurant d’être derrière des policiers persuadés que leurs proies se trouvent  devant eux.
         Rapidement, il sort de la ville et emprunte des routes désertes.  En quelques kilomètres, il atteint son objectif : une friche industrielle où une nature agressive reprend ses droits. Les maigres bosquets ayant pris rapidement de l'ampleur, prétendent désormais au statut de bois, et travaillent déjà à l'obtention d'une promotion en tant que forêt véritable. Les routes déformées par les racines, vivent leurs dernières années. De petits arbres poussent à travers les lézardes et bloqueront bientôt le passage. De ci de là, on discerne encore quelques bâtiments effondrés ou éventrés. A une intersection, le véhicule bifurque  vers l'un de ces édifices. Bâti en béton plutôt qu'en tôle, il résiste encore à la végétation. C'est là qu'Antoine comptait décharger et stocker son butin de la soirée afin de le revendre tranquillement au détail par la suite. Malheureusement il va être impossible d'y laisser un animal sauvage.
         Le camion doit être équipé d'un système de repérage. Il va falloir s'en débarrasser rapidement et sans laisser de traces.

         Une fois garé, Antoine ouvre en grand le haillon arrière. Une petite lampe au plafond diffuse une lumière blafarde. On n'y voit guère mais la caisse ne semble pas avoir pris de balle perdue. Les trous d'aération sont suffisants pour permettre à l'air de passer et à l'odeur de fauve de se répandre, mais ils sont bien trop petits pour permettre d'examiner l'animal.
         Depuis l'intérieur de la caisse, une respiration calme se laisse discerner. La bestiole doit avoir été droguée pour le transport. Mieux vaut en profiter tant que l'effet persiste.
         Du coffre de sa voiture, garée à quelques pas, il tire une lampe torche frontale, un pied de biche et de la corde. Le reste du matériel est rapidement remisé sur la banquette arrière. Voilà, maintenant il faut espérer que l'animal ne sera pas trop gros.
         Les planches de la boîte ont été vissées. C'est plus solide qu'avec des clous mais aussi beaucoup plus difficile à ouvrir. Le bois explose avec des craquements sinistres alors qu'Antoine dégage une ouverture suffisante pour observer son butin.
         Le faisceau de la lampe frontale pénètre dans l'ouverture. Le visage s'en rapproche pour mieux voir. Une forme apparaît. Une forme fusiforme, couverte d'une fourrure rase, prolongée par un pied.

    Un pied ?!!!

    "Bordel de merde ! Un néolion !!!"

          Ces animaux ne sont censés vivre qu’en laboratoire avec une machine à la place de la tête. Combien ça peut valoir ? Certainement un fric dingue. Bien plus qu’un tigre. A quoi ça peut ressembler ?

         Vu la morphologie de la jambe, celui-là doit être une femelle ou un jeune. Si c'est une femelle il faudra se méfier. Chez les lions ce sont elles qui chassent. Si ce trait de caractère a survécu aux manipulations génétiques elle peut être dangereuse.
         L'animal est à plat ventre. Rapidement, Antoine passe ses mains par l'ouverture et lie solidement ses pattes, puis il pratique une autre ouverture, au jugé, afin de pouvoir atteindre les mains (pattes avant?) de la créature toujours endormie et les attacher dans le dos.
         Rassuré, il achève de défoncer la caisse pour en extraire sa proie. C'est bien une femelle. Son corps est celui d'une jeune femme. La crinière, la fourrure, les dents et l'odeur empêchent de lui donner un âge. Si elle était humaine cela pourrait être entre quinze et trente ans, mais allez savoir avec ces animaux. Un long filet de bave ruissèle sur son pelage.
         Avant de la charger dans le coffre de sa voiture, Antoine lui place un épais bâillon entre les crocs. Elle a une dentition impressionnante. Avec des dents pareilles elle doit pouvoir arracher de bons bouts de chair sur ses proies.  En revanche elle n’a pas de griffes. Ses doigts et ses orteils sont terminés par des ongles longs, mais cassés et sales.
         On a beau savoir qu’elle n’est pas humaine il y a quelque chose de troublant et malsain à la voir ainsi nue et ligotée.
         Assez rêvé. Il sera toujours temps de l’observer quand ils seront en lieu sûr. Elle ne pèse pas bien lourd. Son pelage est doux et chaud. Elle est toute molle dans ses bras. Ses seins tressautent doucement alors qu’il la transporte vers le coffre de la voiture.
         C’est dingue le corps qu’on leur a fait. Combien une femme serait prête à mettre pour se payer un corps pareil ? Mon dieu, on ose à peine imaginer l’éventail des usages pour une bête pareille. Certains sont très glauques mais, après tout, si Antoine trouve un client qui a suffisamment de moyens… Il sera toujours possible de faire un don quelque part pour soulager sa conscience.
         En la pliant un peu, elle tient dans le coffre. Sa tête et ses pieds ont cogné un peu durant le chargement mais rien de grave. Elle devrait survivre. Il y a assez d'air pour qu'elle tienne le temps du trajet. De toute façon, le coffre et l'habitacle ne sont pas isolés. Ce ne sera pas confortable mais ça ira.
         Avant de partir il faut effacer ses traces. Antoine sort de sa voiture un bidon d'huile qu'il verse sur le tas de bois qui fut une caisse et dans la cabine du camion, puis il déclenche le feu. Il y a de l'essence dans le réservoir, ça devrait suffire à finir de faire flamber le reste.
         Dans le rétroviseur, alors qu’il s’éloigne, une lueur au loin témoigne de la bonne prise du feu. Il ne restera rien pour le trahir.

         Maintenant il faut réfléchir. Comment s’occupe-t-on d’un animal pareil ? Ont-ils les mêmes besoin que les lions ou cela a-t-il été modifié au fil des modifications qu’on leur a fait subir ?
         Vu l’odeur qu’elle dégage et sa dentition elle doit plutôt manger de la viande. Il vaut mieux que ce soit de la viande morte, car l’idée de voir cette créature à silhouette humaine manger des poulets vivants lui donne déjà de sérieuses nausées.
         Les lions vivent dans la savane, ce n'est pas tout à fait le climat d'ici. Cela dit, certains sont acclimatés dans des réserves sous d'autres latitudes. Elle a de la fourrure, elle doit bien résister à un petit froid.

         De son enfance à la ferme, Antoine a gardé quelques souvenirs des soins à prodiguer aux animaux ainsi qu’une profonde rancœur pour ses parents. Une nuit de ras le bol, il a claqué la porte et s’est enfui. Ils ne se sont revus que quelques années plus tard, lors du procès qui l’a envoyé en prison pour trois ans. Son père n’a même pas desserré la mâchoire pour le saluer. Hors de question de se tourner vers lui pour avoir un conseil sur la façon de s’occuper de cette créature.
         Qu’il aille se faire voir !
         Sa mère, en revanche, lui manque parfois. Il s’imagine, à l’occasion, lui passer un coup de fil pour renouer le contact et prendre des nouvelles. Mais le risque de tomber sur le vieux con le paralyse. Et puis quoi lui dire de toute façon ? « Je suis sorti de prison. Vous n’étiez pas là »? Ca sonnerait un peu comme un reproche.  «Je suis devenu honnête, j’ai un chouette travail »? Si c’est pour mentir, autant ne rien dire. Le silence a ceci de bien qu’il ne permet aucun mensonge. En matière de probité Antoine ne se sent pas capable de mieux.
    Il a bien essayé parfois de se ranger. Mais allez trouver un travail avec un dossier judiciaire. Soit on vous refuse, soit on vous exploite, soit c'est illégal. C'est pas faute d'avoir cherché.
         A sa libération, l’assistante sociale lui a débloqué le pécule qu'il avait gagné en bossant durant l'incarcération, mais ça fond malheureusement comme neige au soleil. Au bout d'un moment il faut trouver une solution, alors Antoine a recommencé, repris contact avec ses indics pour trouver les bons plans sans risque que personne ne veut tenter, avec l’espoir, chaque jour, de tomber sur le gros coup qui lui assurera la tranquillité.
         Et, ce soir, c’est arrivé ! Sa chance, son occasion ! On n’en a qu’une comme ça dans une vie. Il ne faut pas la laisser partir. C’est comme la femme de votre vie ou votre date de naissance qui sort au loto. Ca n’arrive qu’une fois. Alors il ne faut pas tout gâcher. Il faut réfléchir vite, prévoir les emmerdes, trouver le débouché et se barrer vite fait avec l’argent tant qu'il est chaud.
         Première chose à faire : se faire oublier. Ca ne risque pas d’être trop compliqué : d’un point de vue social c’est à peine s’il existe.
         Il a plusieurs indics. S’ils ne le voient pas pendant un temps ils penseront qu’il est allé voir ailleurs. Pareil pour ses receleurs.
         Côté argent il a un peu de réserve. De quoi vivre pendant quatre mois environ, mais il va y avoir des frais... Il faudra nourrir la bête et la viande ça coûte cher. Cela dit, il n’est pas obligé d’acheter de la viande de grande qualité. Quelques bas morceaux devraient la satisfaire. On n’a jamais vu un lion bouder un bout d’antilope un peu faisandé.
         Par contre il faudra faire attention à tout payer en liquide. Les logiciels de traçage arrivent à pointer ce que vous achetez en carte de paiement. Il y a fort à parier que les personnes qui ont perdu cette bestiole vont se mettre à la recherche d’une personne dont la consommation de viande a grimpé en flèche. Autant ne pas leur faciliter la tâche. Avec un peu de chance, les groupes qui étaient présents ce soir vont se suspecter mutuellement et dépenser une énergie folle à s’espionner les uns les autres. Ce sera toujours ça de gagné comme diversion.
         Tout à ces réflexions, Antoine conduit sa voiture dans un coin désert. Devant lui la route s’enfonce dans les arbres, au cœur d'une autre forêt. Il emprunte un chemin de terre plus ou moins entretenu et s’arrête finalement devant un vieux portail rouillé fermé par une chaîne et un verrou. Il l’ouvre, rentre la voiture et le referme derrière lui. Le voilà en sécurité. Chez lui.

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  • Commentaires

    1
    Marquise de Miaoucha
    Samedi 22 Octobre 2011 à 16:48

    On oublie souvent de citer la mort par arme à feu  parmi les complications possibles d’un rhume.
    => j'adore !

    2
    mikaroman Profil de mikaroman
    Lundi 24 Octobre 2011 à 00:17

    Je me suis beaucoup amusé aussi à l'écrire

     

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